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Syndicat Mixte d’Eygues en Aygues : une création attendue
Retour d'expérience
En lieu et place de plusieurs syndicats de rivière, avoir un seul gestionnaire « Gemapi » pour tout le cours d’eau : l’idée fait sens, mais la mise en œuvre peut être laborieuse. Sur l’Æygues entre Drôme, Hautes-Alpes et Vaucluse, c’est chose faite depuis 2020. Après plusieurs tentatives restées infructueuses.
crédit photo : SMEA
« Tout le monde espérait qu’il allait être créé avant», remarque Frank Souciet, le directeur du Syndicat Mixte d’Eygues en Aygues (SMEA). C’est finalement le 1er janvier 2020 que le nouveau syndicat mixte a pu être créé, à partir de la fusion et dissolution des trois syndicats qui préexistaient sur l’Æygues. Le projet avait échoué sur deux premières tentatives, voulues par les services déconcentrés de l’Etat et bloquées par plusieurs collectivités. La jeune structure, dont la mise en place opérationnelle s’est faite en 2021 en plein Covid, est désormais opérationnelle. En 2022, une étude de dangers (EDD) sur le système d’endiguement d’Orange et une modélisation hydraulique sur tout le bassin versant ont pu être lancées, signalant la montée en puissance du syndicat sur la Prévention des inondations (le « PI » de la compétence Gemapi). Les chantiers sont nombreux.
115 km de long et des crues violentes
Avant le SMEA, trois syndicats mixtes étaient à la manœuvre contre les inondations de la rivière Aygues : à l’amont le SIDRESO, avec une majorité de communes de la Drôme (26) et quelques communes des Hautes-Alpes (05), dans la partie médiane et entièrement drômoise, le SIDREI et sur l’aval de la rivière, en Vaucluse (84), le SMAA. « Seules huit communes du bassin versant n’adhéraient à aucun syndicat », raconte Frank Souciet. Le SMEA regroupe aujourd’hui sept intercommunalités (EPCI) qui lui ont transféré l’ensemble de la compétence Gemapi (les 4 items) sur tout le bassin versant. La rivière, dont le nom s’écrit Eygues à Nyons et Aygues à Orange, d’où la contraction Æ, coule depuis le massif des Baronnies jusqu’au Rhône, sur 115 km. La seule digue classée A du bassin versant se situe en rive gauche de l’Aygues à Orange. Longue de 7,4 km, elle a été surclassée en A en 2010, du fait de la configuration de la rivière à cet endroit et des enjeux importants qu’elle protège (zone urbaine et hôpital d’Orange).
Illustration : endiguement à Orange
Deux projets de création inaboutis
Dès la fin des années 1990 et à la suite des inondations du 22 septembre 1992, sur lOuvèze, qui avaient provoqué 47 morts à Vaison-la-Romaine, « une première initiative de fusion des syndicats de l’Æygues avait été initiée » se souvient Frank Souciet, comme cela avait pu l’être sur les bassins versants voisins de l’Ouvèze et du Lez. «L’idée était déjà d’avoir un seul syndicat à l’échelle de tout le bassin versant ».
Malgré des premières discussions dès 1996, il faudra attendre 2011 pour voir le projet d’un syndicat mixte unique inscrit officiellement dans le Schéma Départemental de Coopération Intercommunale de la Drôme. Un projet d’arrêté fut rédigé par le Préfet en 2012… Avant d’être refusé par plusieurs blocs communaux. Ces derniers arguèrent de la nécessité de plus de concertation et d’une meilleure clarification du périmètre.
Cinq ans plus tard en 2016, la préfecture du Vaucluse s’associait à celle de la Drôme pour susciter à nouveau la création d’un gestionnaire unique. Ce projet était formalisé dans les deux schémas de coopération intercommunale de la Drôme et du Vaucluse, puis par un arrêté portant création d’un syndicat unique. Mais là encore, le projet fut refusé par plusieurs intercommunalités. Les motifs invoqués étaient proches de ceux de 2012 : manque de visibilité sur la gouvernance, besoin de plus de concertation et risque, si la règle des « deux délégués titulaires par membre » s’appliquait, de voir le poids des communes de l’aval (pesant 70% de la population du bassin versant) dilué dans la répartition des droits de vote.
Au-delà des justifications officielles, il est possible qu’un manque de volonté entre l’amont et l’aval et un déficit de concertation, du fait d’un éloignement tant territorial que politique, ait joué un rôle dans ce nouveau refus. Sur des bassins versants voisins, ceux du Lez et de l’Ouvèze également situés entre Vaucluse et Drôme, un syndicat unique a pu être créé dès 1997 (Lez) et entre 2000 et 2011 (Ouvèze).
La Gemapi relance la création
«Clairement, il a fallu l’arrivée de la compétence GEMAPI pour que la fusion se fasse », observe aujourd’hui Frank Souciet. En septembre 2017, le préfet du Vaucluse a réuni les sept EPCI et les trois syndicats existants. « Il leur a dit : Puisque la Gemapi va être transférée aux EPCI au 1er janvier 2018, il devrait être plus facile de vous mettre d’accord à 7 qu’à 64 communes. Autrement dit, à vous de vous entendre maintenant ! », raconte Frank Souciet. A partir de là, le syndicat vauclusien (SMAA), le seul à posséder un agent en son sein, a travaillé avec les référents technique des EPCI. Ce groupe de travail a pu rédiger des statuts, qui ont été adoptés à l’été 2019.
Essor du syndicat et premières études
A sa création, le 1er janvier 2020 le SMEA s’est vu doté d’un premier collaborateur, Frank Souciet, venu de la communauté de communes du Pays Réuni d'Orange (CCPRO) et chargé de constituer une équipe opérationnelle. Celle-ci, regroupant une responsable administrative, une technicienne PI et un technicien GEMA, a été constituée en pleine pandémie du Covid 19 et installée en janvier 2021. Depuis, plusieurs chantiers ont pu être lancés : Concernant le « volet PI », une modélisation hydraulique à l’échelle du bassin versant ainsi que les éléments techniques et administratifs du système d’endiguement de la rive gauche de l’Æygues à Orange permettant de compléter le dossier d’Autorisation dudit système pré-déposé en juin 2021. Parallèlement, le SMEA poursuit la gestion courante du système d’endiguement d’Orange (visite, surveillance, entretien) et amorce le classement d’autres systèmes d’endiguement du bassin versant (Nyons, Sainte Cécile les Vignes). Concernant le « volet GEMA », la priorité a été de poursuivre la mise en œuvre du « Programme Pluriannuel de Restauration et d'Entretien » (PPRE) des anciens syndicats (SIDREI et SMA) ainsi que de concevoir un nouveau programme de travaux.
Illustration : crue à Tulette
Volet études lancé en 2022
C’est ainsi qu’en avril 2022, le SMEA a pu lancer un appel d’offre structurant, pour une « Etude de Dangers (EDD) du Système d'endiguement Rive Gauche de l'Aygues à Orange intégrant l'étude hydrologique et la modélisation hydraulique à l'échelle du bassin versant ». Cette vaste étude, dont le budget est d’un peu plus de 300.000 euros, a été notifiée avant l’été 2022. «Elle va nous permettre également de préfigurer les autres systèmes d’endiguement, certainement à Nyons et probablement à Sainte-Cécile les Vignes et Rémuzat », explique Frank Souciet.
Illustration : enjeux derrière les digues d'Orange
Système d’endiguement de classe A
L’ EDD concerne l’ensemble du Système d’Endiguement rive gauche de l’Æygues à Orange qui inclue deux digues : la digue de classe A précédemment évoquée et une digue de classe B (6 km) située dans son prolongement. La digue de classe A a été successivement gérée par la commune d’Orange (2010 à 2014), puis par la CCPRO (2014 à 2019) via une convention de délégation de maîtrise d’ouvrage. En juin 2021 le système d’endiguement a fait l’objet d’une demande de régularisation cependant le dossier déposé était incomplet sur sa composante EDD, du fait de l’absence de modélisation hydraulique et donc de scénario de rupture, ainsi que sur le volet de la maîtrise foncière. Ce deuxième point n’a rien d’inhabituel pour des digues situées majoritairement sur des parcelles privées. «Nous avons engagé en février 2021 une démarche de conventionnement avec les 85 propriétaires des parcelles d'assiette des digues (courriers, permanences). Aujourd'hui nous avons conventionné 55% des parcelles, soit 71% du linéaire de digue. Néanmoins certains propriétaires sont morts et d’autres ont refusé de signer ou n‘ont pu être joignables», explique le SMEA. Face à cette situation, une enquête parcellaire a été lancée, dans la perspective de mettre en place une Servitude d’Utilité Publique MAPTAM sur la totalité des parcelles d’ouvrages.
Un futur PAPI sur l’Æygues
D’autres chantiers attendent le SMEA, dont l’un est l’élaboration et l’animation d’un Programme d'Actions de Prévention des Inondations (PAPI). Ce PAPI est indispensable pour obtenir des financements de l’Etat pour une partie des travaux sur les systèmes d’endiguement. Or construire et animer un PAPI nécessite des moyens financiers et humains, notamment pour la consultation et le suivi du bureau d'études. Le SMEA a acté un nouveau recrutement début 2023, pour conduire la construction et l’animation territoriale du PAPI ainsi que pour relancer le contrat de rivière, le dossier de candidature de 2014 n’ayant pas été présenté pour agrément, avant la création du syndicat unique.
Financements du syndicat mixte
Grâce au PAPI et/ou au contrat de rivière, l’animation et la communication (création d’un site internet) pourront être renforcées. Plus globalement, le futur PAPI permettra d’obtenir des financements en complément de ceux qui sont déjà mobilisés par le SMEA. Ces financements comprennent la taxe Gemapi, instaurée par chaque EPCI membre, sachant que certaines la répartissent entre plusieurs structures gemapiennes ou bien en conservent une partie pour assurer eux-mêmes la compétence Gemapi : c’est le cas de la CCPRO qui a conservé la gestion du système d’endiguement de la digue d’enceinte de Caderousse sur le Rhône. Les autres financements proviennent des départements et de l’agence de l’eau RMC pour la partie GEMA, ainsi que des reliquats des anciens syndicats.
En 2022, la participation des EPCI a ainsi représenté 59% du budget de fonctionnement :
- Fonctionnement : 1 350 000 €
- Investissement : 1 950 000 €
- Participation financière des EPCI membres : 800 000 €.
Illustration : endiguement à Nyons
Complications chemin faisant
A l’automne 2022, le SMEA était constitué de cinq collaborateurs, un recrutement ayant eu lieu en 2022. Malgré ce renfort, Frank Souciet indiquait que certaines obligations réglementaires relatives aux Systèmes d’Endiguement étaient difficilement tenables, du fait de la naissance tardive du Syndicat, de certaines lenteurs administratives et des difficultés apparues chemin faisant. C’est le cas pour la digue de l’Æygues à Nyons, pour laquelle le cadastre indique comme propriétaires trois Associations Syndicales Autorisées (ASA) distinctes, qui sont pourtant dissoute, en sommeil ou sans activité. Une procédure de régularisation de la propriété - nécessaire à la maîtrise foncière de la digue - a bien été engagée par le SMEA en partenariat avec la commune de Nyons et la DDT 26, dès l’été 2020. Elle n’a toujours pas abouti, alors même que cette digue aurait dû faire l’objet d’un arrêté préfectoral d’autorisation au 1er juillet 2022 sous peine d’être soumise à neutralisation.
Malgré les difficultés, le directeur du SMEA reste confiant. Le syndicat est encore jeune et son déploiement sur tout le bassin versant ne fait que commencer.
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CARACTERISTIQUES CLE DU SMEA |
|
Bassin versant |
1 000 km2 |
Nombre de communes présentes sur le BV |
64 |
Nombre d’EPCI adhérents |
7 |
Modalité d’exercice de la Compétence Gemapi |
Transfert des 4 items de la compétence |
Compétences complémentaires |
Celles spécifiées aux alinéas 11 et 12 de l’article L 211-7 du Code de l’environnement |
Effectifs du SMEA |
5 (en 2022) |
Linéaire du réseau hydrographique |
De l’ordre de 1 500 km |
Linéaire d’ouvrage recensé par les services de l’Etat |
75 km |
Ouvrages classés avant 2015 |
Digue d’Orange (7.4 km) |
Les sept EPCI membres du SMEA :
- CC du Sisteronais-Buëch (CCSB / 05)
- CC du Diois (CCD / 26)
- CC des Baronnies en Drôme Provençale (CCBDP / 26)
- CC Drôme Sud Provence (CCDSP / 26)
- CC Vaison Ventoux (CCVV / 84)
- CC Aygues Ouvèze en Provence (CCAOP / 84)
- CC du Pays Réuni d'Orange (CCPRO / 84) qui deviendra au 1er janvier 2023 la CCPOP (CC du Pays d’Orange en Provence)
Les trois syndicats qui ont fusionné pour donner naissance au SMEA :
- Syndicat Intercommunal Des Rives de l’Eygues Supérieure et de l’Oule (SIDRESO)
- Syndicat Intercommunal Des Rives de l’Eygues inférieures (SIDREI)
- Syndicat Mixte pour l’Aménagement de l’Aygues (SMAA)
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Structure
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