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Comment définir un système d’endiguement ?

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illustration Comment définir un système d’endiguement ?

Article mis à jour le 14/01/2019

La nouvelle doctrine sur les digues et autres ouvrages de protection a consacré la notion de « système d’endiguement ». Mais comment les définir ? Eclairages et retours d’expérience du Cerema, du SMIAGE et du SMAVD.

Image : Digue des Buissonnades à Oraison, confortée en 2016 (crédit photo SMAVD)

Définir un système d’endiguement est un préalable à la demande d’autorisation qui formalisera les niveaux de risque et de responsabilité assumés par le gestionnaire de digues, titulaire de la compétence GEMAPI. Mais comment faire ? France Digues a demandé à trois acteurs de la GEMAPI de partager leurs conseils et leur expérience sur ces sujets. Patrick Ledoux est ingénieur au Service Risques Inondations Littoraux et Hydrauliques du Cerema (centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement). Bertrand Jacopin est Directeur des études et des travaux au Syndicat Mixte d'Aménagement de la Vallée de la Durance (SMAVD). Leslie Salvan est ingénieure hydraulicienne au Syndicat Mixte Inondations, Aménagement et Gestion de l'Eau Maralpin (SMIAGE). Trois points de vue qui se complètent.

Cet article sera prolongé par la publication des retours d’expérience plus détaillés de Bertrand Jacopin et Leslie Salvan.

Rassembler les données d’entrée

« Un premier angle d’attaque, c’est de rassembler et d’analyser les données d’entrée, c’est-à-dire l’ensemble des connaissances existantes sur les ouvrages et le milieu environnant », conseille Patrick Ledoux du Cerema.

Ce point de vue est partagé par Bertrand Jacopin du SMAVD. « Dans un contexte marqué, comme chez nous, par un nombre d’ouvrages impressionnant, la première chose c’est de regarder comment s’inonde le territoire et quels sont les ouvrages importants. Pas la peine de commencer par un diagnostic détaillé et trop exhaustif : il faut d’abord s’approprier la connaissance du territoire et comprendre les mécanismes d’inondation. Il faut donc faire une étude hydraulique ou s’approprier les études existantes. »

Les études hydrauliques et morphologiques fournissent des données essentielles sur les débits des rivières et sur les niveaux d’eau en cas de crue. « On y trouve une première esquisse des ouvrages faisant obstacle à l’extension des eaux dans le lit majeur de la rivière », explique Patrick Ledoux.

Leslie Salvan, ingénieure hydraulicienne du SMIAGE, conseille elle aussi de regarder les études existantes : « On regarde l’antériorité des digues, l’Etude de dangers (EDD) quand il y en a une. Pour être dans une cohérence hydraulique il faut prendre en compte les autres digues ou systèmes à proximité, ceux qui peuvent se trouver en rive opposée ou sur un affluent. On regardera  aussi les éléments annexes, qui ne seront pas constitutifs du système d’endiguement mais qui seront à considérer dans l’EDD : remblais, qu’ils soient naturels, routiers, ou ferrés. »

Les études hydrauliques et morphologiques doivent être complétées par des relevés topographiques, existants ou à réaliser. « Les analyses topographiques permettront de définir précisément les lignes de défense », ajoute Patrick Ledoux. Ces relevés consistent à recenser tous les remblais : digues, routes, voies de chemins de fer.  La somme de ces remblais permet de dessiner un contour autour d’une « zone d’étude », qui préfigure et englobe la ou les futures zones protégées. Les études morphologiques permettent d’identifier des protections complémentaires. « Si un seuil en rivière à proximité d’une digue stabilise le fond de la rivière et joue ainsi  un rôle de protection contre l’érosion des endiguements, alors  ce type d’ouvrage pourra être intégré au système d’endiguement  », estime ainsi Patrick Ledoux.

Où trouver les études existantes? Certaines sont présentes chez l’EPCI gestionnaire, ou bien accessibles auprès des services déconcentrés de l’Etat, DREAL et DDT. D’autres peuvent être disponibles chez les maîtres d’ouvrages et/ou les bureaux d’étude qui ont travaillé sur les premières études de danger, antérieures au décret de 2015.

Définir la zone protégée

Une des premières questions à se poser quand on veut définir un système d’endiguement est « quelle est la zone qu’on veut protéger et pour quel niveau de crue à peu près », poursuit Patrick Ledoux. « Il faut se poser la question des moyens financiers et humains nécessaire à l’entretien et au maintien à long terme de la protection : a-t-on vraiment les moyens de protéger tous les territoires inondables aujourd’hui habités  avec des digues ? ».

Pour un syndicat comme le SMIAGE, ces questions sont parmi les premières qui sont abordées avec ses EPCI adhérentes. Tout n’est pas à inventer : « La plupart des zones protégées ont déjà été définies dans le passé, c’est le cas pour les digues qui étaient classées avec l’ancien système ; donc on a une base. Nous  avons surtout un travail d’actualisation », explique Leslie Salvan.

Au niveau du SMAVD, on ne part pas de zéro non plus. Depuis sa création en 1976, le syndicat de rivière devenu Etablissement public territorial de bassin (EPTB) en 2010 a progressivement rationnalisé le réseau d’endiguement de la Durance. « Les grandes zones et les niveaux de protection ont déjà été mis en cohérence, en particulier lors de notre contrat de rivière 2007/2017. Nous sortons de plus de 10 ans de travaux de rationalisation, et la nouvelle réglementation ne fait que régulariser la logique menée depuis 10/15 ans », explique Bertrand Jacopin. Pour autant, des diagnostics complémentaires sur les ouvrages existants seront nécessaires pour définir les niveaux de protection à déclarer. Ces diagnostics interviennent au moment des études de dangers (EDD). «  Au stade des EDD une des premières choses à faire, c’est de poser un diagnostic sur les ouvrages qui ont été retenu pour un système d’endiguement afin de quantifier le niveau de protection qu’ils apportent. En Durance, il faudra encore des diagnostics approfondis sur des digues non restructurées ».

Le rôle irremplaçable des élus

Une fois les diagnostics effectués sur le niveau de protection actuel, « il y aura un temps de choix sur le budget et sur le niveau de protection qu’on veut atteindre », poursuit Bertrand Jacopin. En fonction des enjeux, une ville pourrait par exemple décider de mettre un budget X pour assurer la protection cinquantennale et dans ce cas prévoir l’évacuation en cas de crue supérieure à la cinquantennale, ou bien mettre un budget plus élevé pour assurer la protection centennale.  Sur certaines communes, il pourrait être préférable d’adapter les logements pour diminuer leur vulnérabilité, plutôt que de rénover ou relever une digue. Dans tous les cas « Les Gémapiens ne sont pas tenus par la loi de prendre en charge la gestion de toutes les digues préexistantes », signale Patrick Ledoux du Cerema.

Ces choix des niveaux de protection et des budgets travaux sont éminemment politiques, ils relèvent des élus. « La grande difficulté pour le président de l’EPCI », selon Bertrand Jacopin, « c’est de mettre en place une compétence nouvelle extrêmement technique, structurante et engageante et qui était anciennement partagée par de très nombreux acteurs. Il lui faut à la fois satisfaire des obligations règlementaires en faisant en sorte que tous les ouvrages qui protègent les personnes aient un statut (une classe) et des niveaux de performance définis. Il lui faut par ailleurs faire le choix de conduire de lourds travaux si les ouvrages ne lui semblent pas assez performants. Il lui faut enfin organiser et garantir un mode de gestion des digues en toute circonstance alors même que de (trop) nombreux ouvrages ont été longtemps largement abandonnés. » Dans ce contexte, les élus ont tout intérêt à bien s’entourer, notamment en écoutant les diagnostics des techniciens des établissements publics territoriaux de bassin. 

Reste une question importante, sur la méthode et le séquencement : à quel moment le système d’endiguement est-il défini ? Leslie Salvan nous donne sa réponse : « La définition définitive ne peut pas se faire avant l’Etude de dangers (EDD). Elle se fait sur la base d’objectifs antérieurs à l’EDD et et se construit par des allers retours entre les différents acteurs tout au long de la réalisation de l’EDD, qui va se dérouler en plusieurs mois. C’est la complexité du chantier : les textes voudraient qu’on définisse le système d’endiguement et qu’ensuite on l’étudie. Mais on se rend compte que c’est l’EDD elle-même qui va affiner cette définition et définir en particulier la capacité de protection actuelle. »

 

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Cet article sera prolongé par la publication des retours d’expériences plus détaillés. 

Voir l'article croisé du Cerema : Le Cerema interviewé par France Digues sur la définition des systèmes d’endiguement

Publications du Cerema sur le sujet : 

https://www.cerema.fr/fr/actualites/rapport-etude-dangers-systemes-endiguement

https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/guide-gemapi-2018

https://www.cerema.fr/fr/centre-ressources/boutique/gemapi-0

Thibault LESCUYER pour France Digues

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Contributeur

Perrine BROUST

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